La migraine de l’enfant et de l’adolescent

Les enfants peuvent souffrir de migraine dès leur plus jeune âge. La migraine est aussi invalidante chez l’enfant que chez l’adulte. Elle nécessite une réelle prise en charge adaptée, aussi bien en termes de traitements que d’accompagnement. Les symptômes de la migraine chez l’enfant sont souvent pris pour des troubles digestifs : les vomissements et/ou les douleurs abdominales sont fréquents, alors que parfois la céphalée est inexistante. Tant que l’enfant ne peut pas verbaliser ses symptômes, le diagnostic est compliqué.

ado et migraine pexels

Ces explications ne prétendent en aucun cas vous aider à poser un diagnostic. Seul un neurologue de préférence spécialisé en migraine peut, en s’appuyant sur les critères internationaux, vos antécédents familiaux et son expérience, poser le diagnostic et mettre en place un traitement. N’hésitez pas à poser des questions. Tout mal de tête, inhabituel, difficile à supporter ou qui se répète nécessite un avis médical.

LA PRÉVALENCE DE LA MIGRAINE CHEZ L’ENFANT

La migraine est fréquente chez l’enfant et l’adolescent mais souvent sous-diagnostiquée. Sa prévalence est estimée entre 5 à 10 %. Elle est plus élevée chez les filles et elle augmente avec l’âge.
En France, dans une étude menée en milieu scolaire en 1998 à Paris, auprès d’enfants de 5-6 ans et de 11-12 ans (1 372 enfants inclus), la prévalence de la migraine était estimée entre 4,8 % et 8,2 % de la population étudiée (étude non publiée).
Dans le monde, la prévalence moyenne de la migraine chez l’enfant et l’adolescent évaluée sur 210 524 patients était de 9 % (IC95 % 7,1 à 11,1 %), 10,5 % (IC95 % 7,7 à 3,3 %) chez les filles, 7,6 % (IC95 % 6,3 à 9 %) chez les garçons.

LES CRITÈRES DE DIAGNOSTIC OFFICIELS

Les critères de diagnostics officiels de la migraine chez l’enfant sont les mêmes que chez l’adulte. Ils sont définis par l’International Classification of Headache Disorders ICHD-3.

Migraine sans aura

La migraine est aussi associée à d’autres phénomènes :

Migraine avec aura

LES CARACTÉRISTIQUES SPÉCIFIQUES

La migraine de l’enfant est la même maladie que celle de l’adulte. Elle présente néanmoins des caractéristiques spécifiques :
-pâleur,
-yeux cernés,
-douleur abdominale souvent au premier plan,
-nausées,
-vomissements,
-mal de tête des deux côtés avec une sensation plus compressive que pulsatile,
-durée de la crise généralement plus courte : de 2 à 4 heures,
-sommeil réparateur.

► Évolution : un enfant migraineux ne sera pas forcément un adulte migraineux.

Selon une étude sur 10 ans auprès d’enfants migraineux : 41,8 % d’entre eux ont connu une migraine persistante, 38,2 % une rémission et 20 % une céphalée tensive.

► Impact et handicap :

1 enfant sur 2 a plus de 1 crise par mois.
Plus des 3/4 des enfants déclarent une intensité de crise de modérée à sévère.

La moitié d’entre eux pleurent pendant la crise.
84 % voient leurs jeux perturbés.

40 % souffrent de nausées et/ou de vomissements.
33 % subissent des douleurs abdominales.
52 % souffrent de vertiges

Enfin, il est à noter que l’absentéisme scolaire plus élevé que chez les non-migraineux reflète factuellement le handicap généré par la migraine.

Source : Centre de la douleur de l’hôpital de La Timone à Marseille.

DES SYNDROMES PRÉCURSEURS DANS L’ENFANCE

► Syndrome : ensemble de signes et de symptômes se présentant simultanément, suggérant la présence d’une maladie ou un risque accru d’en développer une. C’est le terme utilisé dans la classification internationale.

Certains syndromes dans l’enfance peuvent s’avérer précurseurs de migraine. Pour le dire plus simplement, cela signifie qu’il est possible que les pathologies décrites ci-dessous évoluent vers une migraine typique.

► Vertiges paroxystiques bénins.

Il s’agit d’un trouble caractérisé par de brèves crises récurrentes de vertige, survenant sans avertissement et disparaissant spontanément, chez des enfants par ailleurs en bonne santé.
L’enfant a ainsi l’impression que la pièce tourne, le vertige dure moins d’une minute.

Critères diagnostiques selon l’ICHD-3 :

  1. Au moins cinq crises répondant aux critères B et C.
  2. Vertige survenant sans avertissement, maximal dès son début et se résolvant spontanément après quelques minutes à quelques heures sans perte de conscience.
  3. Au moins un des cinq symptômes ou signes associés suivants :
    1. nystagmus (mouvement involontaire des globes oculaires)
    2. ataxie (trouble de la coordination des mouvements)
    3. vomissements
    4. pâleur
    5. peur
  4. Examen neurologique et fonctions audiométriques et vestibulaires normaux entre les crises.
  5. Non attribué à une autre pathologie. En particulier, les tumeurs de la fosse postérieure, les crises épileptiques et les troubles vestibulaires ont été exclus.

Remarques :
Les jeunes enfants souffrant de vertiges peuvent ne pas être capables de décrire les symptômes vertigineux. L’observation par les parents de périodes épisodiques d’instabilité peut être interprétée comme un vertige chez les jeunes enfants.

► Migraine abdominale.

Il s’agit d’un trouble idiopathique observé principalement chez les enfants sous forme de crises récurrentes de douleurs abdominales médianes, modérées à sévères, associées à des symptômes vasomoteurs, des nausées et des vomissements, durant de 2 à 72 heures et avec une normalité entre les épisodes. Les maux de tête ne surviennent pas pendant ces épisodes.
La douleur de l’enfant se situe donc ici dans le ventre. Elle peut être modérée à intense, accompagnée de nausées, de vomissements et d’une pâleur.

Critères diagnostiques selon l’ICHD-3 :

  1. Au moins cinq crises de douleurs abdominales répondant aux critères B à D.
  2. La douleur présente au moins deux des trois caractéristiques suivantes :
    1. localisation médiane, périombilicale ou mal localisée
    2. localisation médiane, périombilicale ou mal localisée
    3. qualité terne ou « juste douloureuse »
    4. intensité modérée ou sévère
  3. Au moins deux des quatre symptômes ou signes associés suivants :
    1. anorexie
    2. nausée
    3. vomissement
    4. pâleur.
  4. Les crises durent de 2 à 72 heures si elles ne sont pas traitées ou si elles sont traitées sans succès.
  5. Absence totale de symptômes entre les attaques.
  6. Non attribué à un autre trouble.

► Vomissements cycliques.

Définies comme des crises épisodiques récurrentes de nausées et de vomissements intenses, elles sont généralement stéréotypées chez l’individu, et avec un timing prévisible des épisodes. Les crises peuvent être associées à une pâleur et à une léthargie. Il y a une résolution complète des symptômes entre les crises.
En d’autres termes, l’enfant souffre de vomissements répétés, accompagnés d’intenses nausées, sur des cycles de 4 à 5 jours.

Critères diagnostiques selon l’ICHD-3 :

  1. Au moins cinq crises de nausées et de vomissements intenses, répondant aux critères B et C.
  2. Stéréotype chez chaque patient et récurrent avec une périodicité prévisible.
  3. Tous les éléments suivants :
    • des nausées et des vomissements surviennent au moins quatre fois par heure
    • les crises durent ≥ 1 heure, jusqu’à 10 jours
    • les crises surviennent à ≥ 1 semaine d’intervalle
    • absence totale de symptômes entre les attaques
  4. Non attribué à un autre trouble.

Les enfants peuvent être atteints de migraines plus rares (hémiplégiques ou vestibulaire, voir notre page Types de migraines).

AUTOUR DE L’ENFANT

Consulter médicalement

Un enfant atteint de migraine souffre autant qu’un adulte.
Il est donc indispensable de consulter afin d’obtenir le bon diagnostic. Le médecin traitant et le pédiatre sont habilités à le faire. Ils devraient pouvoir vous expliquer la pathologie, vous donner des conseils et mettre en place un traitement au besoin.

Si nécessaire, il prescrira des traitements de crise et/ou des traitements de fond. Un traitement de fond peut être mis en place très tôt si la fréquence et l’intensité des crises a un fort retentissement sur la qualité de vie de l’enfant.

Une consultation auprès d’un neurologue s’impose dès lors que les crises sont fréquentes. Il confirmera le cas échéant le diagnostic.
L’autohypnose et la relaxation sont des techniques qui fonctionnent bien avec les enfants.

Retrouvez plus d’informations dans nos traductions d’articles La migraine de l’enfant et Traitement de la migraine chez les enfants.

Favoriser son inclusion à l’école

La migraine peut avoir pour conséquence une déscolarisation ainsi qu’une désocialisation progressive de l’enfant. Afin d’y pallier, il existe plusieurs dispositifs que vous pouvez retrouver sur la page Écoles, études supérieures : les dispositifs d’aménagements.

Quelques outils pour l’aider et l’autonomiser

Nous vous encourageons à parler de la migraine avec votre enfant, pour qu’il comprenne au mieux ce qu’il vit. Afin de lui apporter votre soutien bienveillant, nous vous proposons des pistes d’actions concrètes pour l’aider.

Nous mettons également à disposition des outils conçus par La Voix des Migraineux pour votre enfant, mais aussi pour ceux qui l’accompagnent (médecin, école, proches) :
✓ Nous avons conçu une brochure particulière, destinée aux enfants, mais susceptibles d’être diffusée chez les médecins et dans les écoles.
✓ Vous y trouverez également un calendrier des migraines destinés aux enfants. C’est un outil précieux pour assurer le meilleur suivi de votre enfant et l’aider à s’impliquer, lui redonner un peu le pouvoir. Il est accompagné d’une notice d’utilisation.

Voici trois sites ressources utiles :
Dolomio.org, site traitant de la Douleur chronique et migraine de l’enfant et de l’adolescent.e,
Sparadrap, site de l’Association pour les enfants malades ou hospitalisés,
Hôpital Armand-Trousseau, AP-HP, au sujet de la prise en charge de la douleur chez l’enfant à l’hôpital.

Enfin, vous pouvez prendre connaissance de la question des déclencheurs alimentaires chez l’enfant dans cette traduction réalisée par La Voix des Migraineux.

Participer à la recherche

L’espoir existe et la recherche avance. Des essais cliniques avec les enfants sont en cours pour les anti-CGRP et les gépants, en France et dans le monde. Retrouvez les informations ville par ville sur les hôpitaux proposant de rejoindre ces essais :
Pour le Rimegepant
Pour l’Atogepant

Un article de l’American Migraine Foundation donne des pistes à évoquer avec le médecin. Il a été traduit par Marie Bartoli, bénévole à l’association.

Enfin, vous pouvez retrouver la traduction par Theo Delaunay de La migraine chez l’enfant, article publié dans la revue Practical Neurology.

La Voix des Migraineux se mobiliser pour la condition des enfants migraineux en menant de nombreuses actions : vous pouvez les suivre en consultant nos Actualités sur notre site ou sur nos réseaux sociaux.

Votre soutien bienveillant permettra à votre enfant de vivre mieux avec la migraine.
La recherche avance vite, gardons espoir pour eux.

Rédigé par Sabine DEBREMAEKER, présidente de l’association.

Sources :

Variantes de migraines chez les enfants, David Rothner, 2018, PubMed
Migraine de l’enfant : quelles particularités ? 2023, Société Française d’Etudes des Migraines et Céphalées
Migraine de l’enfant, Cinzia Nobile, 2022, La revue du praticien
Pronostic des migraines chez les adolescents : une étude de suivi sur 10 ans, Roberto Monastero et al., 2006, PuMed
La migraine de l’enfant, Dr Tourniaire et Dr Annequin, 2003, Pediadol Le Douleur de l’Enfant

Vertige paroxystique bénin associé aux migraines, ICHD-3
Migraine abdominale, ICHD-3
Vomissements cycliques, ICHD-3

Enquête internationale, Health Behaviour in School-aged Children HBSC, menée sur 210 524 patients
Épidémiologie, évolution, pronostic de la migraine et des céphalées primaires chez l’adolescent et l’enfant, Annequin, Tourniaire, Amouroux, 2014, Springer

International Headache Society
VIDAL